Bien arrivée au Pérou, dans la magnifique ville de Cusco. J'ai en tête l'envie de faire une belle randonnée : relier les ruines inca de Choquequirao, accessibles seulement à pied après 2 jours de marche, au Machu Picchu, soit un périple de 6 à 8 jours. Je suis donc à l'affût du moindre randonneur susceptible de m'accompagner. Après 3 jours d'attente, nada! Pas un marcheur en vue!! Je me résigne à me renseigner auprès d'une agence pour faire la randonnée en groupe avec un guide.. Hors le prix exorbitant, la description du programme me rebute..seules quelques heures sur chaque site, sans la possibilité de profiter pleinement et librement, à mon rythme. J'ai en tête depuis quelques temps une citation de Sénèque "ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que nous n'osons pas, mais parce-que nous n'osons pas qu'elles le sont".. Il est peut être temps pour moi d'oser partir seule en randonnée, à l'aventure! Thibault, avec qui j'ai marché le camino de Choro en Bolivie, finit de me convaincre. Il a fait la randonnée quelques jours avant, le chemin est sûr, bien tracé et fréquenté. C'est décidé, je pars seule à Choquequirao! Le programme est connu, le GPS installé sur le téléphone, les courses faites, le sac bouclé, le message envoyé aux parents pour ne pas qu'ils s'inquiètent de ne pas avoir de nouvelles, direction le terminal de bus de Cusco! J'y vais à pied pour tester le poids du sac.. Trop lourd! Mais comment faire autrement! La tente, le réchaud, la popote, 3 à 4 jours de nourriture, je n'amène que le minimum! Achat du billet de bus, et là, la simplicité du voyage, je rencontre Joy (flamand) et Violetta (espagnole) qui partent aussi à Choquequirao! Ils ne vont pas jusqu'au Machu Picchu, mais j'ai des compagnons de route pour le début de la marche. Après 5 longues heures de bus, un nombre incalculable de lacets, et une belle rencontre avec une petite péruvienne de 4 ans qui fera une partie du voyage sur mes genoux, on arrive enfin à Cachora, petit village encore épargné par le tourisme de masse. Une courte nuit et c'est parti! Premier jour. Départ de Cachora, à 2850m d'altitude. 2h30 de montée jusqu'au col, dans les eucalyptus, dans la fraicheur du petit matin, puis 3h00 de descente jusqu'à la rivière, située à 1500m d'altitude! Le chemin est éprouvant,trop raide, et en plein soleil!! Je marche seule, Joy et Violetta marchent trop vite pour moi. Je suis obligée de m'arrêter, j'ai la tête qui tourne, il fait trop chaud, je suis plus habituée aux glaciers qu'à la Yunka! Je repars tranquillement, à mon rythme. Je me fais doubler par les muletiers, qui portent les sacs des groupes, et qui me proposent de prendre mon sac pour 30 soles! Je refuse, si je veux aller au bout, il va falloir tenir! Après 4 heures 30 de marche, je retrouve mes compagnons de route dans un oasis de fraicheur, pour une pause déjeuner bien méritée. Du Rio, encore 2 heures de montée sur le versant opposé. Arrivée à Santa Rosa, après 7 heures de marche et un sacré dénivelé! Je monte ma tente au milieu des bananiers, je savoures une bonne douche glacée, et je dines chez l'habitante : riz, spaghettis et haricots blancs/sauce tomates, accompagné d'un matecito (infusion d'un mate de coca). Un délice! Je me couche heureuse de cette première journée! Deuxième jour. Réveil à 5 heures, petit déjeuner à la lueur de la frontale, pliage de tente, je suis la première à quitter le campement. Au total, on est 11 randonneurs sans guide (5 couples, et moi!), et un groupe de 2 avec un guide, un muletier, et 2 cuisiniers (!!). Je repars tranquillement, à mon rythme. Deux heures 30 de montée jusqu'au petit village de Marampata, d'une cinquantaine d'habitants, situé à 2850m d'altitude, et accessible seulement à pied, et premières vues sur les ruines! Après un petit ravitaillement (il va falloir tenir 4 jours seule!), et 1 heure 30 supplémentaire de marche, me voila arrivée sur le site!! On plante notre tente à proximité des ruines, dans une forêt dense et humide! Et c'est parti pour l'exploration!! Le site est très étendu, il faut compter plusieurs heures de marche. Je me promène entre les terrasses agricoles, les habitations, les édifices religieux. On devine entre les arbres des ruines encore cachées par la végétation. En bas du site, des travailleurs dégagent de nouvelles terrasses. Je vais me coucher des images plein la tête, heureuse et chanceuse de dormir dans un site aussi unique. Troisième jour. Réveil à 5h30, et rebelotte, j'ai le rythme, déjeuner et pliage de tente. Je pars avec mon gros sac vers le haut du site, où se trouve le chemin pour le Machu Picchu. Je profite de la matinée pour continuer à explorer les ruines, avant de continuer la marche. On est 5 (français!) à poursuivre le chemin, les autres font demi tour. Après une courte marche de 3 heures, on dormira sur les terrasses inca abandonnées de Pinchaunoyoc, seuls au monde, où le système d'irrigation encore en fonctionnement nous offrira une douche fraîche réconfortante. Quatrième jour. Départ au petit matin, descente vers le Rio Blanco à 1900m d'altitude, puis 3 heures de montée jusqu' à la ferme Saint Valentin à 3000m d'altitude. Habitée par un couple, à une journée de marche du village le plus proche, on est au bout du monde. Cochons, volailles, vache, veau, chèvres et sol en terre battue, c'est une vie dure et d'une autre époque que je découvres ici. Les poules courent entre nos tentes. Une nouvelle douche glacée, une petite lessive et l'après midi pour se reposer avant l'ascension du lendemain! Cinquième jour. 4h00 de montée jusqu'au col de San Juan à 4100m d'altitude, puis 1h30 de descente jusqu'au village de Yanama. Je laisse mes compagnons de route derrière moi. Je dors, et cuisine, chez l'habitant. Une nouvelle route mise en service en 2014 me permettra le lendemain de m'épargner l'ascension du col de Totora à 4800m d'altitude, et de relier directement en collectivo (bus local) Santa Teresa, et Hydroelectrica, sur la route du Machu Picchu. Sixième jour. Départ à 5h du matin en collectivo/mini van, assurant l'unique transport de Yanama. Le van est plein à craquer, comme d'habitude! On est une vingtaine pour 12 sièges. Le collectivo peine à gravir les lacets, jusqu'au col, avant de redescendre sur la vallée. Je croise les doigts pour que les freins ne lâchent pas. La dextérité du conducteur nous amènera à bon port sans trop de frayeur, après 4 heures de route. Autre taxi, autres lacets, jusqu'à Hydroelectrica. De là, 1h30 de marche le long de la voie ferrée pour arriver (presque) au pied du Machu Picchu! Le site du MP est uniquement accessible en train, et le prix du billet pour les étrangers est très cher. Pour les voyageurs les moins fortunés, il s'agit donc de prendre un bus jusqu'à Hydroelectrica, puis de marcher 2h30 le long de la voie ferrée jusqu'à Agua Calientes, au pied du MP. J'ai choisi d'éviter la ville touristique d'Agua Calientes, je plante ma tente en amont de la ville, dans le jardin d'un petit refuge! Je marche quand même 8 kms de plus aller retour pour aller acheter mon billet pour le MP! Septième jour. Réveil à 5h00, déjeuner rapide et départ pour le MP! 30 minutes de marche a la frontale le long de la voie ferrée, seule, à écouter les bruits de la nature! Puis 1h de montée pour rejoindre l'entrée du site. Je ne suis plus seule, des hordes de touristes se sont aussi levés tôt pour découvrir le MP au petit matin! Après la tranquillité de Choquequirao, le choc est rude, mais la beauté du site reste inchangée! Je passerai la journée à arpenter le site, à admirer l'ingéniosité des incas et la beauté des paysages. Je rentre éreintée, mais quelle aventure!! Huitième et neuvième jours. Retour a Cusco par la route des écoliers, et visites de sites incas et des salines de Maras, dans la Vallée Sacrée.